GUIDE DE HAUTE MONTAGNE

mardi 29 mars 2016

Montrebei

Ces deux dernières semaines, une météo instable les WE, et des conditions peu enthousiasmantes en montagne, m'ont conduit à deux reprises à transformer des sorties initialement prévues glace/mixte (et oui, normalement, c'est la saison...) en terrain d'aventure de l'autre côté de la frontière... Histoire de vivre mieux cette frustration, je choisis un endroit magnifique pour son cadre, comme pour son escalade : Montrebei !

Premier acte avec l'équipe jeune FFME :

Après un but neige, au col d'Ares, on opte pour le côté Puente de Montana... Ca tombe finalement pas trop mal, les jeunes qui découvrent le lieu sont ravis d'emprunter le chemin taillé dont ils avaient tellement entendu parlé ! Petit inconvénient, on a prévu d'aller vers le milieu de la paroi et de ce côté, la marche d'approche mais aussi le retour ne sont pas optimum...

Gregory et Pierrick font la "Paul Lalueza", une grande classique de la paroi, pendant que j'ai la chance de parcourir la mythique "via del corbeau" en compagnie d'Agathe et Antoine.

Grégory dans le passage d'artif de la Paul Lalueza
C'est vraiment une voie superbe dans ce niveau. Jamais rien de très dur mais toutes les longueurs sont soutenues...


 Antoine attaque la voie et avec Agathe on suit. Il fait carrément pas chaud !


Agathe prend la tête
 Le final en cheminée est formateur.


Nous avons trouvé que la fameuse longueur d'off width (qui n'en est pas du tout une, vu que c'est une cheminée...) en 6b n'était pas plus dure que celle d'avant en V+ (made in Bunny...) si ce n'est qu'elle nécessite un peu plus d'abnégation loin au dessus du dernier piton...

Deuxième acte avec l'équipe jeune CAF :

Cette fois ci, pas question de se faire avoir par la neige au col... On fait donc le tour par Ager pour prendre la piste qui conduit au Prado où nous comptons passer 3 jours hors du temps, dans ce havre de paix... Après 2 km de piste, on se fait arrêter par une énorme flaque de boue infranchissable qui nous barre l'accès ! Deuxième tentative et deuxième but d'accès à Montrebei, ça commence franchement à me prendre la tête !!!

On emprunte donc le col (qui n'était plus enneigé...) pour se poser à une heure plus que tardive... Dans ces conditions, on décide de temporiser, histoire de pas se mettre à l'arrache dès le premier jour, et on commence à la cool par une petite journée d'acclimatation a Alsamora.

Avec Simon, je pars dans "facteur de chut" la première voie ouverte dans la paroi. Le reste de la troupe sera dans sa voisine "à 20h, la France a peur".



Jeremy attaque la première longueur dans son habit de lumière !
Du côté de Simon c'est artif dans L1
Après une première longueur en 6c sur notre droite, "A 20h..." traverse sur une vire pour venir faire une deuxième longueur commune avec notre voie.

Pour nous ça artife toujours tandis que Max libère le 6c+ de L2
Max en action... Ca penche !
Alors que Simon attaque à son tour L2, les filles nous rejoignent pour la longueur commune. Ensuite Marie part dans L3 pour un 6b pas évident !



Camille dans L3
Une rencontre émouvante, mais sans conséquence, contrairement à ce qu'on essaie de nous faire croire...
Les gars sont déjà sortis et en profitent pour se la couler douce et faire de belles photos !


Je rejoins Simon à R3
Nico détendu, comme à son habitude !

La fine équipe au sommet
Après ce petit échauffement, on décide donc de passer aux choses sérieuses pour aller en paroi de Catalogne !

Marie et Simon qui n'ont jamais grimpé là bas veulent commencer par une classique abordable et en toute logique partent pour le dièdre gris.

Trav descendante de L2 pour Simon

Un moniteur de ski qui ne sait pas étaler la crème solaire !
Il sortiront largement de jour ce qui va leur permettre de randonner "à vue" la descente pas forcément évidente ...


Pour Nico, Jeremy et Paul, ça sera moins classique avec "Estacion orbital Mir" qui voyage dans des zones plus compactes où la traversée est souvent la solution.

Jeremy se régale

Quant à Camille, Max et moi, on a opté pour une des voies de libre les plus exigeantes du lieu : "Miedo a volar..." au nom évocateur...


Max commence les hostilités avec une superbe longueur de 55 m  en 6c, technique et soutenue. Il encape dans la longueur de 7b qu'il enchaîne à la suite d'un beau combat de continuité !

Départ de L2
La trav finale
Une longueur vraiment pas évidente avec une traversée finale où les pieds brillent par leur absence...

vue depuis R2
Je fais péter le crochet talon qui sauve...
Suite à cette belle performance, Max cède la place à sa douce moitié, pour deux longueurs de 6c+ pas forcément extrêmes mais qui demandent de la concentration...

Camille dans le 6c+ de L3
A l'assurage, tout va bien
Nous sommes à l'ombre et un vent très froid s'est levé... Des conditions idéales pour la grimpe mais pas pour poireauter au relais...

Grimpe en doudoune et serrage de croutes au programme !
Camille dans L4
C'est à mon tour de passer en tête. Ce 6c me permet de me mettre en douceur dans l'ambiance. Dans ce genre de voie, être en tête ou en second fait une énorme différence...


Vient ensuite pour moi une des plus belles longueurs de la voie et une des plus magistralement ouvertes. Ce 7a, après un départ pêchu, offre une belle errance dans une dalle extrêmement compacte. Chaque décision doit être pesée sous peine de ne pas pouvoir faire marche arrière, quand à la pose de protections, c'est un vrai casse tête...

Jusque là, tout va bien...
Pendant que je suis au taquet, Camille pose devant la paroi d'Aragon...
Départ physique mais bien protégeable, la suite sera complétement à l'opposé...
Cette longueur me demande pas mal de temps et d’énergie. Il va falloir se ressourcer avant d'attaquer la longueur suivante, crux de la voie, ouverte par un des maîtres de l'engagement : Unaï Mendia...

préparation et concentration
Cette longueur présente la particularité d'être équipée de 5 goujons distants de 5 à 6 m pour une cotation obligatoire de 7b, ce qui est finalement très rare...



Impossible de rajouter quelque chose entre ces points avec une escalade en dalle ultra technique pour les pieds. Les prises de mains étant microscopiques, il faut lutter pour rester en équilibre...


Mes couinements incessants et mes multiples "fais gaffe!"pour ramper d'un point à l'autre maintiennent mon assureur sous tension...
Max m'avouera plus tard avoir vécu intensément cette longueur ayant la lourde responsabilité de gérer une chute potentielle de 15 m dans du positif !


Pour ma part, en plus de la décharge d'adrénaline provoquée par le fait de se mettre au taquet très loin du point, je sais aussi que la réussite ou l'échec de notre cordée repose sur mes épaules...

Passé cette longueur, nous savons que c'est gagné. J'enchaîne par deux longueurs supposées plus faciles, mais la fatigue et le rocher délité finissent de m'achever ! La nuit nous cueille à R9. Complétement morts et transis de froid, nous décidons de sortir par la dernière longueur de "La barra del bar".  Je repasse le flambeau à Camille pour une dernière cheminée et nous sortons au sommet après 14 h d'un combat à l'issue incertaine...


Sans aucun doute une des plus belles et des plus dures de Montrebei. Merci aux ouvreurs pour leur audace incroyable et un grand merci à Camille et Max de m'avoir accompagné dans cette superbe aventure !

lundi 8 février 2016

WE glace et mixte avec l'équipe jeunes FFME

Par les temps qui courent, pas si facile de trouver de la vrai glace dans nos contrées Pyrénéenne...
"Heureusement", le manque de neige qui fait pâlir les amateurs de ski permet parfois aussi de faciliter grandement l'accès à certains secteurs d'altitude...

On se rend donc dans le pseudo "secret spot" ariegeois pour pratiquer l'art de la frappe juste, de la pose de broches et du daubage de mollets !

Après un briefing général pour être bien sûr que toutes les notions sont acquises, je laisse partir les plus expérimentés en autonomie.

C'est parti pour Antoine et Jonas



Le team des luchonnais est plus novice, on fait quelques exercices de calage et on embarque à notre tour. C'est Hadrien qui attaque dans de la glace bien lisse et qui forme des assiettes. Au sol, Pierrick évite les bombes !

Hadrien concentré
 Malgré son inexpérience Pierrick est motivé pour grimper en tête, le garçon apprend vite !


A notre gauche, Agathe, Florian, Antoine et Jonas progressent sur de beaux murs bleutés.



Le Panneau fait une bonne centaine de mètre de haut. La descente s'effectue rapidement à pied sur le côté. Le temps de manger un coup et on repart pour un deuxième tour !



On en a profité un maximum et on effectue le retour à la voiture de nuit. Le temps de renter au gite, de manger et de préparer tout pour demain, il est déjà tard.

5H30... Le réveil pique mais une grosse journée nous attend. On se rend à la station de Porté Puymorens pour 2 h d'approche, ski aux pieds, une bonne pré fatigue avant la suite des réjouissances !

La pointe de la Vignole propose des voies mixtes au caractère bien trempé ! Pour ceux qui n'auraient pas suivit l'évolution de l'alpinisme ces 100 dernières années, c'est un peu comme du Dry tooling, sans les trous forés et la peinture fluo mais avec un bon jeu de coinceurs/friends au baudrier ! 


J'envoie Grégory et Antoine dans le classique dièdre N sur la gauche de la face. Le reste de l'équipe ira dans la ligne centrale "nit de carnestoltes" ( M4+/250m).

C'est Pierrick qui attaque par une superbe longueur qui va lui demander de la réflexion et du temps ! Dans ce genre de terrain, impossible de courir, il faut grimper posément et prendre le temps de trouver de bonnes protections. 



Agathe en mode Ueli Steck !
Après une pente de neige, la progression redevient plus mixte. Bien sûr, aucune trace de glace, seules les touffes gelées nous offriront quelques ancrages corrects !


Chose complétement incroyable, on trouve un ou deux spits de 8 mm aux relais... Je suis toujours étonné que des gens ouvrent ce genre de voies en emportant un tamponnoir et encore plus qu'ils prennent 30 mn pour planter un spit dans du granit alors que 5 mn auraient suffit à planter un piton...


C'est sur qu'à l'endroit où ils les on placé, c'est parfois compact mais quelques mètres plus haut ou plus bas, il y avait carrément moyen...

Les jeunes pas encore habitués à cette logique d'alpiniste s'arrêtent "bêtement" sur ces relais imposés, mais rassurant... Résultat, on se retrouve pendu au milieu de nulle part après une longueur de 30 m alors que 15 m plus haut, il y avait une petite banquette neigeuse pour les pieds et des fissures où il était possible de facilement monter un relais "naturel" !

Vous avez dit confort...
Chaque longueur effectuée est riche en enseignement mais les heures défilent... Je reprends la tête sur la fin pour finir avant la nuit qui tombe alors que nous sommes dans le couloir de descente.
Reste plus qu'une petite session ski de nuit avec quelques beaux virages sur les pistes fraîchement damées !